Je me souviens encore de cette montée. La Roche Parstire, en Savoie. Sur la carte, ça semblait raisonnable. Dans la réalité? Un mur vertical déguisé en sentier! J’avais sous-estimé ce passage, comme souvent quand on se fie uniquement aux chiffres. 800 mètres de dénivelé positif sur moins de 3 kilomètres. La pente s’annonçait sévère, mais j’étais confiant. Après tout, j’avais de bonnes jambes ce jour-là.
Quand le mental devient le vrai muscle de l’effort
Vingt minutes après le début de l’ascension, je l’ai compris. Ce n’était pas mes quadriceps qui allaient décider de l’issue de cette bataille, mais ce qui se passait entre mes deux oreilles. Les montées raides mettent à nu notre dialogue intérieur. Chaque pas devient une négociation entre la partie de nous qui veut abandonner et celle qui refuse de céder.
Ce jour-là, j’ai découvert que mon corps était encore capable d’avancer quand mon esprit lui disait que c’était impossible. Cette sensation est familière pour beaucoup de traileurs chevronnés, mais elle reste toujours surprenante, même après des années sur les sentiers.
Je me suis arrêté un instant, haletant. « Tu sais quoi? À mon âge, je devrais peut-être me mettre au golf! », ai-je plaisanté avec un randonneur qui descendait, l’air beaucoup plus frais que moi. Son rire m’a redonné un peu d’énergie.
Pour progresser sur ces pentes exigeantes, j’ai développé quelques techniques mentales qui ont fait leurs preuves :
- Le découpage mental du parcours en mini-objectifs accessibles
- La technique du « juste 50 pas de plus » renouvelable à l’infini
- L’acceptation de la lenteur comme stratégie, pas comme échec
- La respiration rythmée synchronisée avec les pas
- L’ancrage dans l’instant présent plutôt que la fixation sur le sommet
Leçons tirées des pentes impossibles
Ce que j’ai appris sur cette montée infernale va bien au-delà du trail. La vie elle-même est parsemée de côtes abruptes, certaines invisibles sur nos cartes mentales jusqu’à ce qu’on s’y trouve confrontés. Vous savez, ces défis qu’on croyait pouvoir surmonter facilement jusqu’à ce qu’on y soit réellement confrontés?
La plus grande révélation a été de comprendre que l’inconfort n’est pas un signal d’arrêt, mais une zone d’apprentissage. Sur ces pentes qui semblent sans fin, j’ai découvert que la sensation de ne plus pouvoir avancer n’était qu’une illusion. Nous possédons généralement d’importantes réserves d’énergie que seuls les défis extrêmes révèlent.
J’ai compilé ces enseignements dans ce tableau qui résume ce que ces montées raides m’ont appris :
| Sur le sentier | Dans la vie |
|---|---|
| Le rythme lent mais constant l’emporte | La persévérance bat toujours le talent impatient |
| Regarder ses pieds, pas le sommet | Se concentrer sur l’étape suivante, pas l’objectif final |
| S’autoriser des pauses stratégiques | Reconnaître quand recharger ses batteries |
| Adapter sa technique à la pente | Ajuster son approche face aux obstacles |
Le paradoxe du confort dans l’inconfort
Arrivé au sommet ce jour-là, trempé de sueur mais euphorique, j’ai ressenti ce que j’appelle « le paradoxe du traileur » : nous cherchons délibérément l’inconfort pour trouver une forme supérieure de confort mental. Étrange, non?
Avec le temps, j’ai appris à apprécier ces moments de lutte intense. Pas forcément pendant qu’ils se produisent – soyons honnêtes, personne n’aime vraiment suffoquer sur une pente à 30% – mais pour ce qu’ils représentent et ce qu’ils construisent en nous.
À 58 ans, je grimpe différemment qu’à 30. Plus lentement, certes, mais aussi plus intelligemment. L’âge nous apprend l’économie du mouvement, l’importance de la préparation, et surtout, la patience face aux limitations temporaires de notre corps.
Cette montée trop raide m’a finalement offert son plus beau cadeau : la certitude que tant que la tête tient bon, les jambes suivront. Et quand vous aurez compris ça, aucune pente ne sera jamais vraiment infranchissable. Juste un nouveau terrain de jeu pour tester votre conversation intérieure!